Terreur nocturne parentale

Faire tomber la tétine, l'essuyer rapidos et la lui redonner sans passer par la case stérilisation.
Se mettre en pyjama dès qu'on passe la porte de la maison. A 19h00.
Manger du gruyère au ptit dej avec son café.
Ces petites choses honteuses...

Depuis quelques semaines, on a un très grave problème. Majeur. Crucial. Qui pourrait changer le cours de nos vies. Si ce n'est pas déjà fait.

On vit dans notre chambre.

Voilà. On vit dans notre chambre, parce qu'on a peur de réveiller notre fils. On a tellement peur de faire du bruit dans le salon qu'on a fini par oublier que cette pièce existait. Depuis, on vit, on mange, on dort, on repasse, on étend le linge, on ne regarde plus que des séries et on entasse toutes nos affaires dans notre chambre.

Tout ça, c'est parce que le soir est une angoisse.

Pas le bain, qui est le meilleur moment de la journée, ni son dîner, qui se passe souvent dans le calme et la bonne humeur, ni même le moment privilégié qui s'est mis en place depuis quelques temps et qui consiste à regarder 15 minutes du Roi Lion après le bib, en pyjama-gigoteuse, tout en passant des bras de son papa aux miens et faire le plein de bisous doux avant d'aller se coucher.

L'angoisse, c'est après.

Permettez-moi de replacer le contexte.

De sa naissance à ses 3 mois, aucune soirée, aucun endormissement et aucun nuit ne se ressemblait.
Veilleuses étoilées, petits chats de chez Ikea, guirlandes, peluches musicales... j'avais tout, il n'était fan de rien, le soir on appréhendait. Toujours. Nos bras, l'emmaillotage dans une couverture Red Castle, et une tétine de polysilane furent notre combinaison presque gagnante.

A 3 mois, on s'est débarrassés de l'emmaillotement, contraints et forcés par son âge et sa motricité grandissante, terrifiés devant l'inconnu et persuadés qu'il ne s'endormirait jamais sans. La tortue Tranquil Turtle de Cloud B est arrivée, un peu comme un prince sur son cheval blanc. Avec son bruit de clapotis de vagues également projetées au plafond, et sa douce musique, ambiance spa (sans le string papier), on s'endormait en même temps que lui. Parfois même avant lui.

A 4 mois, on a pris la confiance, et le sort est venu toquer à notre porte, l'air de dire "vous ne pensiez tout de même pas vous en sortir aussi facilement". Les dents ont fait leurs apparition, et 5 semaines de nuits blanches avec.

Depuis, les nuits sont redevenues à peu près normales : au mieux, nuit complète, au pire 1 réveil-tétine. C'est par phase. Ça dépend des dents, de comment s'est passée la journée, de s'il y a eu un arc-en-ciel dehors et des horaires des marées. Bon, ok, en réalité on n'y comprend rien.
Du coup, il y a toujours une petite partie de nous qui vit dans la crainte. La psychose. Comme si chaque soir, entre deux bouchées de poulet grillé, on était sur la sellette.





On a un salon qui est pris en sandwich entre les deux chambres. Donc tous les soirs, quand Aaron est couché et que c'est à notre tour de commencer notre soirée, lâchement, au lieu d'aller diner dans le salon comme on le faisait toujours, on prend notre assiette et on mange dans notre lit devant une série, à l'ombre du babyphone, terrés par la peur que celui-ci ne se mette à clignoter frénétiquement, sonnant la fin de la récré et le début d'une nuit compliquée.

On a fini par réaliser qu'on passait aussi 2 heures sur nos portables. Qu'on ne décollait plus du lit une fois qu'on était dedans. Et qu'à 23 heures on avait l'impression que la soirée entière s'était résumée à rester cloîtrés dans notre chambre comme des pauvrets, scotchés à nos écrans. Ah, le romantisme.

Pourtant, l'expérience nous l'a prouvé, il dort. On a passé plus de soirées cool que de nuits de galères. Il dort même quand on dine dans le salon avec la famille et que l'alarme incendie s'allume parce qu'on a oublié d'activer la hotte de la cuisine, donc on se demande bien de quoi on a peur parfois...

Le mari et moi-même avons donc pris une grande décision.

Réintégrer petit à petit le salon. Re-apprendre à faire un peu de bruit. Comprendre que cela ne devrait pas le réveiller, que de toute façon on n'a pas le choix, parce qu'on va finir par pourrir dans notre lit avec une tendinite du pouce si on continue comme ça. Apprécier à nouveau de s'affaler dans un canapé. Faire des paris pour savoir qui va chercher le sopalin oublié dans la cuisine. Retrouver les programmes télé nuls. Se battre pour la télécommande. Imposer la 50ème rediffusion de Baby Boom. Pleurer devant. Avoir des fous rires tout bas. Passer des bonnes soirées. Tout ça sans l'angoisse du babyphone qui clignote et sans nos portables. Juste en amoureux.

J'ai super hâte. Pour fêter nos retrouvailles (amoureuses oui, mais surtout avec cette merveilleuse pièce de la maison qui a été si délaissée, la pauvre) je vais refaire la déco.
Rendez-vous dimanche chez Ikéa. Bisous.




Commentaires

Sherazade a dit…
Merci pour tes posts qui font tellement echo à ce que je vis au quotidien avec ma fille de 15 mois et mon mari! C'est rassurant de constater que nous ne sommes pas seuls à vivre ce genre d'angoisses et d'interrogations! Mais surtout c est kiffant de mettre des mots sur ce tourbillon d'émotions qu'on vit depuis qu'elle est parmi nous!