Un peu de poussière et une étoile




Hier après-midi, il a eu du mal à s'endormir. Je l'ai bercé, dans mes bras, comme quand il était tout petit. Je n'étais pas chez moi, et comme ça faisait longtemps, je me suis aidée d'une veilleuse. Une veilleuse étoile toute jolie que l'on m'avait offerte et que j'avais laissé ici au bout de quelques semaines (pour parsemer les endroits où il dormait parfois de veilleuses différentes. Oui, une société de consommation, vous avez tout compris). Bref, quand j'ai appuyé sur le bouton, que les étoiles se sont projetées au plafond et que la musique a démarré, j'ai été brutalement projetée 11 mois en arrière, quand, nourrisson, je passais des heures le soir à l'endormir. On lui donnait son biberon, sa tétine de polysilane, on l'emmaillotait, et là, commençait la grande danse nocturne du coucher.
11 mois.
Les flashbacks se sont alors enchaînés.
Tous les biberons dans l'évier. Ceux donnés dans la nuit. Le froid dehors.
Ce samedi matin où l'on avait appelé tous les Aubert de région parisienne pour savoir lequel aurait notre "couverture miracle" Red Castle. Il ne vous en reste plus qu'une ? Ok super, gardez-la s'il vous plait, on va passer, là, dans la matinée... comment ? Vous ne l'avez plus qu'en rose ? Ah non mais vous savez, c'est pas grave, nous, on s'en fout de la couleur, on veut juste une couverture et un miracle. Je tiens d'ailleurs à remercier le magasin Aubert qui s'est trompé dans ses stocks et a provoqué chez nous une déception ultime, au moment où notre regard a croisé l'étagère vide, comparable à la découverte de la non-existence du Père Noël pour un enfant. On avait hésité entre pleurer ou insulter le vendeur distrait, finalement on était simplement repartis bredouille, désespérés. Et puis on avait fini par la trouver cette couverture miracle. Qu'est ce qu'on l'a adorée. On l'a usée, et usée, jusqu'à la 13ème semaine d'Aaron (parce que c'était écrit sur la boîte, "jusqu'à 12 semaines" et qu'il commençait à bien se retourner, sinon on lui mettrait encore peut-être).
Il y a aussi eu ces descentes à la pharmacie, quand j'achetais absolument tout ce que je voyais, une bouillotte peluche, parce que ça soulagera ses coliques, une nouvelle tétine, elle est trop mignonne, oh des céréales, c'est sympa, ça doit donner bon goût au lait, ah mince pas avant 2 mois encore, bon ben je reviendrai, tiens un nouveau biberon, en verre c'est tellement joli, ça fait rétro, et puis y a un petit sapin dessus, trop chou en plus c'est Noël, combien madame, ça fera 42 euros, très bien, par carte s'il vous plaît. Faire ça trois fois par semaine.
Il y a aussi eu ces journées, le mari partait travailler, moi je restais à la maison avec mon petit bébé qui allait un peu mieux, qui avait arrêté de pleurer toute la journée, mais qui ne dormait presque pas, alors c'était café, bébé dans son transat pour une petite session de 50 photos, puis bras, non stop, pour les siestes aussi, et les séries nullissimes que je mettais au départ "juste en bruit de fond", Une histoire, une urgence, Au nom de la vérité ou Petits secrets entre voisins. Je savais que j'étais vraiment en congé maternité juste parce que je regardais ces séries-là. C'est comme les téléfilms de l'après-midi, ceux qu'on regarde avec un oeil moqueur et l'esprit détaché, mais finalement on est en plein dedans, et là on fait moins les malignes, avec notre pyjama, notre bébé dans les bras et la scène finale à laquelle on est suspendue.

J'ai l'impression que tout ça est bien loin. C'est le cas, ça fait presque un an.
Mais ces moments sont tatoués en moi.
Une musique, une étoile, une veilleuse... Et tout me revient, comme si c'était il y a une heure. Qu'est-ce que c'est bon. Même les souvenirs les plus durs. Ça me serre le coeur, ça me prend aux tripes. C'est trop bon.
Ce qui me fait peur, c'est que je penserais sûrement la même chose dans un an à propos de mes habitudes d'aujourd'hui. Et les années qui suivront aussi.

Dites-moi. C'est donc cela, devenir parent ?







Commentaires

Elsa a dit…
Oui ça doitêtre ça devenir parent. Mais moi j'ai quand même des souvenirs qui me serrent le coeur de ma propre enfance aussi...
Nat__acha a dit…
Je me suis grave reconnue dans ce texte. Moi aussi j'avais mes séries nullissimes de congés maternit... sinon moi c'est le savon de l'hôpital son odeur que j'ai re-senti au petit deuxième et ça m'a ramené à mon hospitalisation et la naissance du premier a ce jour ou ma vie a pris son sens ou j ai enfin cru en moi pour avoir realisé la plus belle chose au monde... depuis ma belle soeur est infirmière je lui demande des petits échantillons de se savon et son odeur de "mes enfants" parce que j'en suis accro à ces flashback et ressentir ces sentiments de ces deux jours la