Désiré petit lapin

Janvier 2011.
C'est l'histoire d'une énorme embrouille de couple. Un couple heureux et épanoui, amoureux, qui vit dans le même appart et s'aime assez pour laisser son ordinateur et son portable ouverts sans mot de passe. Cette embrouille majeure, elle s'est passée dans une voiture à l'arrêt, avec du givre sur le pare-brise et les mains glacées, par le froid ou la gravité des évènements, on ne sait pas trop. C'est l'embrouille qui menace de tout arrêter, d'ailleurs la nana le dit, c'est fini. Le mec n'est pas d'accord, il veut prouver son amour, parle, explique, raconte, et puis il va dire un truc, un truc qui va tout changer. Faire basculer l'avenir. Il va dire que si la vie était mieux foutue, "on serait déjà mariés et je te ferai un enfant, parce que je n'attends que ça".

Le couple c'était nous, et je me souviens à quel point ça m'avait sciée, cette phrase, cette pensée, de savoir qu'il était prêt pour un enfant, qu'il en voulait un, avec moi, et pour un mec qui parlait peu et faisait encore moins des déclarations d'amour, ces quelques mots avaient été plus éloquents qu'une tirade romantique avec bouquet de fleurs à la main.
L'embrouille s'est terminée, la vie a repris et l'idée qu'on aurait un jour un enfant, ce qui ne m'avait pas encore traversé l'esprit sérieusement avant, ne m'a plus jamais quittée.
J'ai commencé à regarder différemment ma collègue enceinte. 3 mois plus tard, quand je suis allée lui acheter un cadeau, je suis tombée amoureuse d'un petit lapin couleur parme, le plus mignon du monde. Persuadée que j'aurais une fille, je l'ai acheté, et puis si jamais c'est un garçon, parme ça passe, mais de toute façon, ce sera une fille. Je me suis juré que je lui offrirais, que ce serait son premier doudou, qu'elle n'aurait jamais d'autre peluche et que ce serait merveilleux.
J'étais bien. Comme on était. Pas si pressée, mais heureuse à l'idée qu'un jour je sortirai ce lapin. La vie s'est trouvée un peu mieux foutue, on s'est fiancés, on s'est mariés. Et c'est après ça que j'ai eu vraiment, vraiment envie.
Je suis arrivée dans la phase où je voyais tous les ventres ronds dans la rue, que je repérais les fringues de maternité sur internet pour savoir comment je m'habillerais le jour venu, et que je regardais des accouchements sur YouTube pour vérifier exactement comment ça se passait. Parfois je rendais visite à mon lapin dans le placard, tout en haut. Il était bien emballé dans une jolie boîte ronde, comme une boîte à chapeau. Je l'ouvrais seulement quand j'étais seule, pas envie que le mari me prenne pour une dingue -déjà qu'il n'avait pas compris cette histoire de lapin acheté alors que je n'étais ni enceinte ni près de l'être. J'avais un pincement quand je voyais des bébés, m'imaginais avec un gros ventre, faisais même le coup du coussin pour voir de quoi j'aurai l'air. Je me demandais où on mettrait son lit, repensais notre deux-pièces parisien dans tous les sens, chassais de mon esprit ces histoires de crèches et de nounou et qu'on aurait jamais assez de sous. Je voulais juste être maman. Et je voulais qu'il soit le papa. Je voulais nous voir courir et rire aux éclats avec une tête blonde sous nos bras, nous jeter dans les vagues à la mer, et que le dimanche soir ne soit plus jamais triste, puisqu'on sera tous les trois et qu'on aura nos pyjamas, les looney tunes et des pâtes à la bolo.

Un jour, enfin, on s'est mis d'accord. C'était le dernier jour de janvier 2014. J'ai fini ma plaquette. Un mois plus tard, j'avais mes règles mais je faisais un test, pour être sûre. Il était négatif et comme une capricieuse, j'étais déçue.  On a déménagé trois semaines plus tard dans un appartement trop grand pour nous deux et le 29 mars j'apprenais que je pouvais sortir le lapin de sa boîte. J'étais enceinte.
Ce n'était pas une fille, c'était Aaron. Il n'a jamais voulu du lapin, il n'a jamais voulu de doudou d'ailleurs. Mais les dimanches soirs ne sont plus jamais tristes.

Parfois je repense aux deux jeunes de 22 ans qui se disaient, garés devant le monop', qu'un jour ils auraient un gamin ensemble. Et je souris.



© Ourson Chéri 

(Ah, et le test positif, c'est aussi une histoire passionnante... Ici!)


Commentaires

cynthia a dit…
Alors...euh comment dire lol
Je me reconnais dans ton histoire mais on enlève la partie du lapin.
Comme quoi les histoires d'amour peuvent être tulmuteuses, faites de bas plus que de hauts, des débuts délicats.
Mais les années passent, le pardon, l'oubli et l'amour nous permettent d'avance, de regarder devant et de laisser le passé bien enfoui loin loin très loin.
Quand on voit le résultat on se dit que cette "embrouille" entre toi et ton chéri n'était que le réel début de votre histoire d'amour

Pour ma part, quelques "embrouilles", quelques bas, mais tellement de hauts.
6 ans et demi plus tard, un PACS plus tard, une vie partagée depuis 3 ans, nous voilà en train d'attendre notre little boy (normalement LOL confirm' le 12.02)
Et bah aujourd'hui, je n'ai qu'un seul mot qui caractérise notre histoire, notre avenir: la FIERTE. Fière d'avoir pardonné, fière d'avoir oublié, fière de l'aimer, fière que tout cela soit réciproque.
S'il faut passer par là pour être heureux pour la vie, je resigne n'importe quand pour refaire la même histoire, revivre les mêmes moments, les mêmes larmes, les mêmes peines, les mêmes sourires et le même AMOUR

Xoxo
Unknown a dit…
Purée j'ai tjs une larme qui coule quand je te lis!! <3
Unknown a dit…
Et qui sait, p-être qu'un jour une petite fille s'appropriera ce lapin :-)
Delphine Maarek a dit…
Trop mignonne ma Nesly ! Merci beaucoup ! Et oui peut etre une petite fille un jour ;)