17 mois (MOOD #10)

Je chantais Britney, Beyoncé et Coldplay. Souvent sous la douche.
Je mettais l'eau si chaude qu'elle me piquait presque. C'est le meilleur.
Je passais deux heures sous le jet. La playlist tournait, déjà préparée.
En sortant, peignoir sur le dos, je m'affalais dans mon lit, portable à la main, prête à répondre aux messages de la plus haute importance que j'avais reçu pendant mon karaoké aquatique.
Un jour, les douches sont passées à deux minutes chrono et ma vie a changé.

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Je suis retombée sur une de ces innombrables "notes".
Il y a 16 mois, je tenais chaque jour un carnet de bord, pour essayer de comprendre, analyser, décoder le rythme incohérent et illogique de la vie de mon bébé de quelques semaines.

"Réveils a 3:30 et 5:20, rendormi avec tétine.

6:00 réveil, change
6:15 bib 180 (120+60) fini a 6:40
7:00 transat 
7:15 fatigue, s'énerve, pleure
7:25 s'endort
7:55 s'étire et se rendort
8:25 posé dans le canapé
9:00 étirements  
9:15 réveil (sieste 2h)
Endormi/calme dans la nacelle 
10:00 pédiatre 
11:30 bib 180 galliagest
12:30 osteo 
13:30 sieste poussette à Créteil (2h)
16:00 réveil, bib 180 gallia
16:30 papouilles transat puis pleurs
17:15 sieste couffin (30min)
17:45 réveil tétine
19:00 chouinage énervement
19:20 bib 120 
20:00 chouinage 
21:00 sieste 
22:45 bib 180
00:00 dodo couffin"

et j'envoyais des textos au mari de type :
"Pacha posé ! Déjà 1:45 de sieste (entrecoupées de petits réveils mais la tétine aidée de mes bras ont géré ce matin!) l'important c est qu'il dorme tant pis pour les bras".

Oui, oui tant pis pour les bras.
Il a 17 mois aujourd'hui, et il s'endort sans nous depuis bien longtemps. Je me demande pourquoi j'avais une telle culpabilité de l'endormir dans mes bras aussi petit, bien sûr qu'il avait besoin de ça. Il avait besoin de moi.

L'autre fois, on est allés au supermarché à pied, parce qu'il boude sa poussette et qu'on adore se promener main dans la main. Evidemment il a fatigué en plein milieu des courses, moi j'ai rempli mon panier comme si j'étais au drive, et je me suis retrouvée en galère totale avant de passer à la caisse.  Les gens ont dû se dire "quel enfer" en me voyant avec mon caddie, mon bébé qui court partout, mon air débordé à la caisse automatique à négocier avec mon fils "on pose l'avocat dans le panier, d'accord ?" et à lutter pour ne pas qu'il enlève les articles avant qu'ils ne soient payés sinon ça fait tout buguer et je passe pour une voleuse.
Payer. Ranger. Repartir avec mon sac de courses de 10 kilos dans un bras, mon bébé fatigué de 12 kilos qui n'avait plus envie de marcher dans l'autre, et mon front qui perle. On est rentrés à la maison, j'ai des biceps de compétition et les doigts lacérés par le plastique des sacs trop chargés. Mais je suis gaga, abrutie, les vieux dans la rue m'arrêtent parce qu'ils le trouvent trop mignon et moi je leur dis merci.
Mon fils veut manger plus de gâteaux et moins de purée.  Il pousse l'heure du coucher et avance celle du lever, j'imagine qu'il aime la vie alors je souris.  Il abîme mes pinceaux à maquillage en balayant les murs et jette mes colliers par terre. Je lui ai dit non, mais ça ne marche pas chaque fois. Je serais plus ferme, plus tard. Il dit téti pour tétine, tata pour tasse, et répète yayé quand on dit "ça y est", avec la même intonation, celle qui monte dans les aigus sur la fin.

Les douches ne sont plus brûlantes, parce qu'après les deux lessives, le lave-vaisselle qui a tourné et le bain d'Aaron, on n'a presque plus d'eau chaude. J'ouvre l'eau, et au lieu de la laisser couler -pour qu'elle soit bien chaude quand on se met dessous, non c'est pas écolo, oui je suis frileuse- j'y vais direct, avant que le peu de tiède restant ne disparaisse avec les cheveux emmêlés que je perds par poignées.
Je raconte des histoires de koala et fait semblant de miauler tous les soirs. Je pense à lui en fermant les yeux dans mon lit. J'oublierais presque à quoi ressemblait la vie d'avant, j'avais déjà zappé que je l'endormais aux bras, c'est dire comme la mémoire flanche, déjà.
Rien ne dure jamais. Sauf peut-être son rire qui me dit que tout ira bien. Ce rire bouleversant.
Aaron a eu 17 mois hier, et je bénis le ciel chaque jour d'avoir fait de moi sa maman.







Commentaires

Unknown a dit…
J adore! Comme à chaque fois je me retrouve bon sauf que le mien n'a que 5 mois! Et qu'on est en phase poussées dentaires donc dur dur ! Mais les notes toutes les heures j'ai connu ca quand je relis je ris et les cheveux emmêlés aussi! Je rêve de les couper mais je me marie en septembre donc j'attend sagement.... Bonne soirée a toi!
Unknown a dit…
Lol c exactement ça! Moi Hugo dormait entre nous collé et le sein dans la bouche...au fil des mois il aimait bien rester avec moi dans le lit et on se rendormait ensemble mais depuis 2 mois plus rien et il est pressé de descendre du lit à la decouverte d'une nouvelle journée. Je me retrouve mais je ne sais pas trop comment me positionner, je ne sais pas pourquoi je ressens ce manque alors que j'ai profité de chaque moment avec mon bébé...le temps passe si vite qu'il emmène mes souvenirs avec lui...arff
rilazo a dit…
Mon fils n'a que 4 mois mais je suis déjà nostalgique du nouveau né qu'il était... Pourtant c'était la tété toute les 2h, les coliques, les pleurs si il n'avait pas les bras etc... tout me manque déjâ alors que maintenant il fait ses nuits, n'a plus de colique, s'endort tout seul bref c'est le pur bonheur mais ce n'est plus un nourrisson :-(
Delphine Maarek a dit…
@Amandine
Merci ! Bon courage pour les poussées dentaires alors! et tiens bon pour les cheveux, c'est pour avoir la plus belle des coiffures, ca en vaut la peine ;)

@Aurelie et @Rilazo
On doit s'adapter, chaque phase est belle à sa manière mais celles qui sont révolues donnent toujours un petit pincement à nos coeurs de maman...