Bien-aimé(e)

Il a acheté du shampooing à la camomille pour cheveux blonds. J'ai vu ça ce matin, vers 6h00, sous la douche. J'ai vu un flacon de shampooing et j'ai souri.
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Quand j'étais petite, je ne portais que des robes, et il fallait qu'elles tournent, sinon c'était nul. Je suppliais ma mère pour avoir des jupons, ceux qui donneraient encore plus de volume. J'étais tellement coquette que mes parents m'appelaient Miss Monde. Parfois, je laissais de la vinaigrette bien huileuse sur mes lèvres, pour avoir du gloss comme "Ma sorcière bien aimée". Je voulais les cheveux les plus longs du monde, les brosser le soir dans une chemise de nuit blanche à volants, et dormir avec une tresse. En gros, j'ai failli être bloggeuse beauté à 8 ans.
Apres ça à commencé à foirer pour moi. J'ai eu des boutons, des cheveux frisottés, des bagues en haut et en bas (aux dents, pas aux doigts). Et j'ai gentiment commencé à me détester. Ca a duré toute mon adolescence. J'avais la peau qui brillait, et plein de gens cons pour me le rappeler.
Ensuite, il y a eu les UV, les cheveux qui repoussent, les dents lisses et alignées et l'amour, pour sauver une partie de mon égo en carton. Il y a eu le futur mari, qui avait flashé sur moi malgré mes cheveux noirs corbeaux et mon piercing à la langue. Il paraît que mon sourire a beaucoup joué, heureusement que l'appareil dentaire faisait partie du passé.
Avoir quelqu'un amoureux de soi c'est un peu une révolution. C'est avoir quelqu'un qui fond sur vos manies (comme celle de faire baigner ses céréales dans du jus de pamplemousse au lieu du lait), connaît vos peurs par coeur (ayant une très grave phobie des insectes, c'est tout naturellement, après 7 ans, que le mari bondit devant moi face à la moindre mouche, papillon, moustique, coccinelle, abeille, guêpe et même s'il soupire souvent l'été, il le fait, armé d'un torchon ou d'une chaussure, et c'est mon super-héros à moi dans ces moments là), quelqu'un qui se lève pour vous le soir, quand on est affalés devant une série, qu'on a soudainement envie d'une "petite douceur" et qu'on se regarde mutuellement avec des yeux de cockers pour faire lever l'autre.
Le mari n'est pas du genre démonstratif, il ne parle pas beaucoup, ne mettra jamais de déclaration enflammée sur facebook ou instagram, et se contentera souvent du smiley avec des coeurs à la place des yeux pour répondre à l'une de mes envolées lyriques. Mais de temps en temps, il donne, un peu, il lâche quelques perles, me dit qu'il me trouve "magnifique" alors que j'ai juste mis mes vieilles converses ou que je me suis attaché les cheveux.

Je lui ai dit, prends du shampooing, n'importe lequel, prends celui que tu veux, ça m'est égal. Il est revenu avec un Petit Marseillais cheveux blonds et reflets dorés.
Voilà, il est 6h00, le réveil vient de sonner, l'eau bouillante coule, j'ai attrapé le flacon et j'ai souri.
Il a pensé à moi, il a dû déambuler dans le rayon, et il l'a choisi rien que pour moi et mes nouveaux cheveux tout blonds.
Lui, mon brun ténébreux, avec sa peau sèche et sa bouche en coeur, celle qu'il a été assez généreux de léguer à notre petit poussin, et fait de moi une de ces mamans que je ne comprenais pas avant, celles qui embrassent leur enfant sur la bouche (Je vais vous dire pourquoi on fait ça, vous inquiétez pas, on fait pas un transfert, on leur prépare pas un œdipe pour leur majorité, c'est juste qu'on a envie de les bouffer tout cru, et que leur petite bouche assouvit un peu plus les pulsions cannibales maternelles que leurs joues, si dodues soient-elles). Bref je m'égare.
Le mari est plein de défauts super énervants et de qualités rarissimes. Parmi elles, une en particulier. Il s'aime. Quand je l'ai rencontré, j'ai été stupéfaite par son assurance et je l'ai immédiatement détesté, en cochant la case "prétentieux" à la liste de ses qualificatifs. Finalement il a gagné, on s'est chinés (oui on disait ça à l'époque), on s'est aimés, on s'est mariés et on a fait un bébé. Maintenant il m'achète du shampooing à la camomille, rit à mes blagues, et moi, j'apprends à être comme lui.
Je n'ai jamais cessé de penser que sa plus grande chance dans la vie était de croire en lui.
Je suis obsessionnelle, hypersensible, j'aime des gens qui me donnent des claques, pas sur les joues, non, en plein coeur, je passe ma vie à justifier ce que je n'ai pas fait, en conclusion, je commets une erreur fatale depuis 27 ans et demi, celle d'attendre l'amour des autres pour me sentir digne d'être aimée. C'est super dangereux, c'est con comme un selfie et je le fais quand même.
Lors de mon EVJF le mari avait répondu à un questionnaire sur moi, et à la question "qualité que tu préfères chez elle", il avait dit "sa sensibilité". C'est peut-être un cadeau après tout.
Je voudrais être quelqu'un qui se fout du regard des cons.
J'espère qu'Aaron s'en foutra, qu'il saura comme il est merveilleux, curieux, brillant.
J'espère qu'il saura aimer les autres. Qu'il aura un coeur assez pur pour s'ouvrir au gens et assez solide pour ne pas se briser trop vite.
J'espère qu'il s'aimera autant qu'il mérite d'être aimé.
J'espère qu'il ressemblera à son papa, pour tout ça. La personne la plus forte et la plus intelligente que je connaisse. Ma fierté.

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Tous les soirs, on entend la clé dans la serrure. Aaron me regarde d'un coup, je lis une lueur de malice dans ses yeux. Il crie "papa" et attend, la bouche ouverte, jusqu'à ce que leurs regards se croisent. Ils rigolent en se voyant. On joue, on mange, on s'arrose dans le bain. On va se coucher et ils se font des câlins koala en bâillant. Moi je les regarde, comme une petite souris.
Je les adore, j'en peux plus d'eux, mon coeur explose, ils sont trop beaux, trop doux, trop tendres, y a trop d'amour et je n'ai jamais rien vu d'aussi innocent sur cette planète.
Ils sont mes êtres préférées au monde. Ma vie.
Merci de m'aimer comme vous le faites. De me faire aimer mes défauts. De me sourire, de me trouver belle, de me le montrer à vos façon, en m'achetant du shampooing pour cheveux blonds ou en caressant ces mêmes cheveux dans le bus, après avoir réclamé les bras et s'être blotti contre moi.

Vous remplissez mon coeur, avec de la confiance, de la tendresse, de la sérénité. De la paix.

Vous êtes mon équilibre.

Merci d'avoir fait de moi ta femme depuis bientôt 3 ans. Ce jour-là, tu m'as dit ce jour-là que tu voulais passer tous les autres de ta vie rien qu'avec moi.

J'essaie de m'en souvenir à chaque fois que je doute.
La preuve, tu vois.
Un shampooing, et tout me revient.





Commentaires

Anonyme a dit…
C'est une magnifique déclaration d'amour, et réciproque : une par le geste, l'autre par écrit.
Et c'est toujours si agréable à lire !! Longue vie à vous 2 :-)
Anonyme a dit…
Sublime déclaration et voilà j'ai encore une fois les larmes aux yeux....
Samy74200 sur insta
Pchipchi a dit…
J'adore lire vos textes, c'est si bien dit! Et je me retrouve tellement dans ces sentiments de jeune maman. Belle déclaration!!! Vous devriez écrire un livre ;)
Anonyme a dit…
"quelqu'un qui se lève pour vous le soir, quand on est affalés devant une série, qu'on a soudainement envie d'une "petite douceur" et qu'on se regarde mutuellement avec des yeux de cockers pour faire lever l'autre." C'est tellement nous ça aussi :-)
Préserves ton bonheur comme le plus riche des trésors !
Anonyme a dit…
melle.mymy

C'est un magnifique texte d'amour.
Tu peux être fière de toi.
Julie a dit…
Superbe article comme toujours ������
Delphine Maarek a dit…
Merci à vous toutes pour vos doux mots
Pauline a dit…
Beau billet ! J’ai pris beaucoup de plaisir à le lire. L’on y sent à quel point tu aimes ta moitié et je pense que l’on devrait tous prendre le temps de se le dire.
Delphine Maarek a dit…
@Pauline

Merci Pauline ! ;)