Où est passé mon bébé ? (MOOD #11)

Hier, il a parlé. Pour de vrai. J'avais déjà remarqué quelques fois qu'il baragouinait une sorte de"cor" pour dire encore, mais sans certitude. J'avais toujours un doute, celui de la mère qui s'essaie à l'objectivité. Mais aujourd'hui, quand il réclamait de la citronnade, il l'a prononcé distinctement, plusieurs fois d'affilée, j'ai même finis par réussir à le filmer. On lui servait un petit fond dans un verre, il l'avalait comme un shot de téquila et il nous montrait la bouteille en le disant. "Encorrrre".
Voilà, il l'a dit. Et c'est comme s'il allait passer son bac tout à coup.
Jusqu'ici son vocabulaire se résumait à Papa, Maman, Tétine et Bobo/Boubou (objet mystérieux qui désigne à peu près tout ce qui se trouve dans son champ de vision et pointé par son petit index). Pour finir de m'achever, il a fièrement asséné un "wawar" au moment de dire au revoir, et là je l'ai prise en pleine gueule. Cette claque. Celle qui m'attendait, celle que je n'avais pas vu venir depuis qu'il avait commencé à marcher. Celle qui me rappelle à quel point il grandit vite.

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Tu chantes, danse, pique des colères, ris et bavarde dans un charabia que toi seul comprend pour le moment.
Tu manges en morceaux, aime les chocolats viennois depuis qu'on a fait l'erreur de t'en donner une fois et dévore tout dès que ça a du goût.
Tu veux du poivre (comme moi), de la sauce (comme papa), et tends ton assiette pour un deuxième service parfois.

Il y a un an, en juin, je te voyais commencer à ramper, tu avais 6 mois et demi et j'étais si fière. Maintenant tu marches, tu galopes même. Quand tu cours, tes bouclettes rebondissent derrière ta tête et ça me fait sourire.

Le soir, on dîne tous les trois. On va se brosser les dents, on s'assoit côtes à côtes sur la petite marche et on frotte la brosse de l'autre avec une efficacité relative. On crache, on s'asperge d'eau, on rigole et on fonce dans ta chambre pour se cacher sous le tipi et lire une histoire.
Parfois, tu t'ennuies au bout de 30 secondes, alors je m'adapte, je lis à peine une phrase, et puis j'invente, je dis n'importe quoi, j'y mets des mots vulgaires que je devrais commencer à écarter de mon langage, puisque tu comprends. Parfois, rien n'y fait, tu veux juste tourner les pages alors je te laisse et je te mange de bisous en attendant.
Tu n'es pas toujours attentif, tu n'es pas toujours intéressé, mais tous les soirs on y va et on partage ce moment toi et moi. Tu fermes la quatrième de couverture, je dis "voilà", tu répètes "yaya" et tu vas dans les bras de papa pour lui faire ce que j'appelle bêtement un "câlin de bonne nuit".
Puis c'est mon tour. Mon moment préféré.
Je sens une dernière fois tes cheveux et ton petit cou brioché. Je te mets dans ta gigoteuse, et à chaque fois tu fais exprès de te retourner à toute vitesse sur le ventre avant que je n'ai eu le temps de passer tes bras dedans, alors je dis "attennnnnds" avec une voix faussement scandalisée, tu glousses, puis tu te laisses faire. Je remonte la fermeture éclair, jamais jusqu'en haut, parce que je sais que tu aimes bien toucher le petit morceau de tissu qui dépasse. Je te regarde longuement. Avec ta tétine et tes grands yeux si doux, je te revois nourrisson, je revois cette tête de bébé innocent mais déjà si malicieux et je me dis que tu es le plus mignon du monde.
Te contempler, gagner quelques secondes en t'expliquant le programme de ta journée du lendemain, et en profiter pour te rappeler comme je t'aime. Fais de beaux rêves, bonne nuit mon coeur, tu m'envoies un bisou. De temps en temps, tu le fais. Tu m'envoies un bisou avec ta petite main en l'air. Un bisou volant, pour moi, maman. Avec le vrai bruit de la bouche et tout.

Tu vois, nous les parents on dit souvent des trucs du style Tu grandis trop vite, on se demande Où est mon bébé ?, et on se lamente Où sont les plis sur les cuisses et les vêtements taillés en mois ?

C'est vrai, Aaron, tu grandis si vite. Mais moi j'en ai rien à foutre que tout aille trop vite, oui c'est l'année dernière que tu apprenais à ramper et c'est maintenant que l'on découvre que tu sais monter les escaliers. Ces secondes ne reviendront pas, mais c'est toujours le même rire qui suspend le temps quand on est près de toi, c'est toujours ton sale caractère qui nous fatigue autant qu'il nous amuse. C'est toujours toi.

18 mois de journées à penser à toi devant mon café et de nuits à te regarder dormir, parfois en prenant une photo, juste parce que t'es trop beau.

Tu sais, j'ai bien l'intention de te voir vieillir, prendre des rides et du ventre, te plaindre de tes impôts et de tes enfants pas sages.

Alors mon petit coeur de 18 mois et 25 jours, continue, grandis, vieillis, ne t'arrête pas.
Chacun de tes sourires disparaît aussi vite qu'il est arrivé, mais je suis là et je les vois. Je me souviendrai.
Je n'oublierai jamais mon bébé aux cris de dragons à la maternité, son premier éclat de rire à 2 mois, ses deux dents du bas à 4 mois, ses cris de guerre improbables, ses "ho-ho", ses moues, et ses bisous volants lancés depuis son lit, entre Simba et la gigoteuse zippée seulement à moitié.
Hier, mon bébé a dit "encore"  et "au revoir".
C'est vrai, tout va bien trop vite. Mais tout est trop bon. Alors grandis encore. Et fais-moi ce plaisir. Ne t'arrête jamais.

© Ourson Chéri



Commentaires

Unknown a dit…
Amoureuse de ton blog, de ton écriture... Continue encore et encore c'est un réel plaisir.
Anonyme a dit…
Tu lui dis "continue de grandir" et moi j'ai envie de te dire "continue d'écrire" ! Je me retrouve tellement dans tes textes, tes mots. Ta facon de mettre des mots sur ta vie de maman est superbe.
Et pour en revenir au sujet, oh oui, ca passe trop vite, mais qu'est ce que c'est beau de les voir grandir... Et leur premier "je t'aime", c'est la plus belle chose, et même si mon fils se trompe encore en me disant "je t'aime de tout le coeur maman", je fond à chaque fois et ma fille qui me le répète plusieurs fois à la suite parce que c'est une vraie chipie... Merci pour tes mots !
Unknown a dit…
Quel magnifique texte à chaque fois je pleure. Je les partages ils sont tellement émouvant. Comme j'ai pu le mettre sur mon profil, tu me bluff tu écris ce qui quasiment inexpliquable parce-que ce sentiment d'amour est tellement fort que c'est difficile dans trouver les mots. Tu es la plume de nos émotions et je t'en remercie parce-que c'est juste magnifique merci.
Delphine Maarek a dit…
@Loriane
Merci beaucoup Loriane je suis très touchée !

@Anonyme
Merci à toi pour ce joli commentaire qui me fait vraiment plaisir ! tu ne peux pas savoir comme j'ai hâte d'entendre le premier "je t'aime"...

@Julie Favre
Julie, je suis très émue par ton message ! C'est si gentil de partager, merci infiniment pour tout !