La maternité m'a redonné foi en l'être humain
J'étais une mauvaise personne.
Petite, non. J'étais gentille limite bonne poire. J'aimais toute ma classe, j'admirais les populaires, je rêvais secrètement d'en faire partie et j'avais mon petit clan de copines.
Un jour, ado, je suis devenue légèrement clepto, mais ça s'est arrangé le jour où je me suis fait choper.
C'est après que ça s'est corsé. Je suis devenue une connasse plus tard.
La vie, l'adolescence, les épisodes de ce qu'on appellerait aujourd'hui le harcèlement scolaire. Tout ce qui m'a fait mûrir à vitesse grand V et détester beaucoup de monde à la fois.
Les autres, la vie, moi.
Un jour, je suis devenue cynique et ça ne m'a jamais quittée. Je n'aime pas les gens naïfs, je ne tolère aucune bêtise. On m'a tellement dénigrée que je me suis crue au dessus du lot. Allez vous faire foutre, gens inintéressants.Les gens. Vous savez bien. Ceux qui se plaignent des râleurs. Ceux qui condamnent mais adorent les ragots. Qui te bousculent dans le métro pour sauter sur ta place. Qui te frottent le dos en t'embrassant avant d'y casser violemment du sucre une fois que tu te seras tourné de l'autre côté. Les gens me déçoivent, alors je suis devenue sauvage. Je dis bonjour et au revoir, c'est tout, rien de plus. Ne me parlez pas dans les magasins, ne me demandez pas si je veux de l'aide. Foutez-moi la paix. Je suis devenue comme ça à force. Je me suis éteinte. A cause d'eux. Quand je marche dans la rue, c'est pour aller d'un point à un autre. Jamais je ne parlerais à un inconnu.
Petite, non. J'étais gentille limite bonne poire. J'aimais toute ma classe, j'admirais les populaires, je rêvais secrètement d'en faire partie et j'avais mon petit clan de copines.
Un jour, ado, je suis devenue légèrement clepto, mais ça s'est arrangé le jour où je me suis fait choper.
C'est après que ça s'est corsé. Je suis devenue une connasse plus tard.
La vie, l'adolescence, les épisodes de ce qu'on appellerait aujourd'hui le harcèlement scolaire. Tout ce qui m'a fait mûrir à vitesse grand V et détester beaucoup de monde à la fois.
Les autres, la vie, moi.
Un jour, je suis devenue cynique et ça ne m'a jamais quittée. Je n'aime pas les gens naïfs, je ne tolère aucune bêtise. On m'a tellement dénigrée que je me suis crue au dessus du lot. Allez vous faire foutre, gens inintéressants.Les gens. Vous savez bien. Ceux qui se plaignent des râleurs. Ceux qui condamnent mais adorent les ragots. Qui te bousculent dans le métro pour sauter sur ta place. Qui te frottent le dos en t'embrassant avant d'y casser violemment du sucre une fois que tu te seras tourné de l'autre côté. Les gens me déçoivent, alors je suis devenue sauvage. Je dis bonjour et au revoir, c'est tout, rien de plus. Ne me parlez pas dans les magasins, ne me demandez pas si je veux de l'aide. Foutez-moi la paix. Je suis devenue comme ça à force. Je me suis éteinte. A cause d'eux. Quand je marche dans la rue, c'est pour aller d'un point à un autre. Jamais je ne parlerais à un inconnu.
Bref, je déteste les gens. Et je les emmerde.
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Après avoir entendu toutes les théories sur la grossesse, l'accouchement, la césarienne, le sommeil, le co-dodo, l'allaitement, Montessori, le RGO, les marques de couches, le liniment, les tours de lit, le cocoonababy, la bugaboo, la babyzen, l'âge de la marche, les bébés "super éveillés", et les chaussures à semelles souples ou pas, on pourrait facilement croire que la maternité est le premier cap de détestation ultime d'autrui, et conclure par un solennel "les gens sont cons" en allant s'enfermer pour toujours dans un igloo avec une gigoteuse en polaire et un chauffe-biberon.
A partir du moment où vous avez un enfant, la barrière de la politesse n'a plus lieu d'exister. On vous accoste dans la rue pour vous dire comme il est mignon mais aussi pour critiquer le port de la tétine.
On vous donne l'avis que vous n'avez jamais demandé. On vous demande ce que vous ne voudriez jamais révéler.
Et pourtant. Je le sais aujourd'hui. C'est la maternité qui m'a redonné foi en l'être humain.
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J'ai détesté tous les gynéco que j'ai croisé pendant ma grossesse. Silencieux, désagréables, froids, distants, comme s'ils voulaient être sûrs qu'on ne pourrait pas les attaquer en justice au cas où ils se tromperaient. A me faire passer pour une folle, ne pas comprendre mes questions, me reprocher mes interrogations, éviter les explications. J'ai eu l'impression d'être une hystérique à peu près tout le temps, ce qui ne m'a pas aidée des masses à me projeter en tant que maman. Jusqu'à un.
Un seul, un docteur qui a tout changé, un qui a écouté, pas comme si j'étais folle, non, comme si c'était moi qui savais et qu'il voulait comprendre, qu'il voulait m'aider. Il a tout rendu différent, plus facile, plus serein. Je ne l'oublierai jamais et c'est grâce à lui que j'ai arrêté de détester les médecins. Juste grâce à lui. Grâce à un.
Décembre 2014. 3 jours après mon accouchement, probablement encore marquée par le moment le plus bouleversant de toute mon existence, je suis passée à la pharmacie pour acheter la liste de 10 pages de choses dont j'avais besoin. J'ai insisté pour y aller seule à pied. Ma première "sortie".
Je suis maman depuis 3 jours, et je sors à la pharmacie. Tout est surréaliste.
Elle a lu l'ordonnance, elle a tout de suite compris. Et puis elle m'a demandé si ça avait été. Là, en moins de 3 minutes, on s'est toutes mises à discuter, toutes les femmes, pharmaciennes, clientes, peu importe l'âge, peu importe l'argent, juste parce qu'on était toutes mamans. Le point épisio et péridurale entre inconnues totales. Elles m'ont tout raconté. Je suis restée 45 minutes et mon mari m'a appelé 10 fois, parce qu'il se demandait ce que j'avais bien pu fabriquer pendant tout ce temps-là. Moi qui ne parle jamais aux inconnus, je suis subitement devenue une autre personne. Une maman bavarde, qui a toujours sa fraise à ramener et son anecdote à raconter. J'ai parlé, détaillé, déversé. Tout ce que j'avais. Parce que tu ne peux pas comprendre mon coeur, mais que d'un coup je n'étais plus seule.
La maternité, c'est la claque qu'il fallait que je prenne pour réaliser qu'on fait partie du même monde que les autres, qu'on traverse les mêmes peines, qu'on vit les mêmes expériences. Alors il y a celle qui a fini avec une césarienne et celle pour qui tout a duré moins d'une heure. Mais on a eu les mêmes doutes, les mêmes craintes, les mêmes joies. En fait, on se ressemblent, les humains, c'est ça ?
Il y a une ultime raison à cette révélation. J'ai aimé les gens à nouveau, parce que mon fils sourit aux gens dans le bus. Oui. Il sourit à tous nos voisins. C'est gratuit, il ne se rend même pas compte de ce que ça implique. J'évite de regarder les gens sur le coup. Et puis finalement je tourne la tête et je souris avec lui. Accrochez-vous à votre chaise, en général, on me répond. Voilà, on se retrouve tous comme ça comme des cons, on est dans le bus, il est 18h, il fait nuit, et tout le monde sourit. Les yeux pétillent, parce qu'il fait son timide, son coquin, son malicieux, bref parce qu'il n'a pas de barrières sociales et que du même coup il fait tomber les nôtres. Derrière chaque visage grave, chaque regard collé à la vitre, il y avait un sourire et c'est Aaron, haut comme trois pommes, qui l'a révélé.
Mettre un enfant au monde c'est l'acte le plus égoïste et le plus narcissique qui soit. C'est créer un être humain, à son image. C'est mettre une âme de plus sur terre alors qu'on est déjà quelques milliards de trop à oublier les arbres et à manger des cheeseburger 100% viande bovine élevée en France (pardon, mais c'est trop bon).
Mais c'est aussi une opportunité. Incroyable. Difficile. Périlleuse.
La transmission.
Rien que pour ça, on n'a pas envie de se foirer. On a envie de redevenir bon, pour lui donner l'exemple et l'espoir.
La transmission.
Rien que pour ça, on n'a pas envie de se foirer. On a envie de redevenir bon, pour lui donner l'exemple et l'espoir.
La maternité m'a redonné foi en l'être humain parce que mon fils voit le monde comme il est vraiment, parce qu'il ne connaît pas la religion des gens de la crèche, se moque bien que la petite Ava mange hallal ou casher, et apprend à dire bisou en portugais tous les soirs en partant. Il gueule un peu si on lui pique un jouet, mais il ne déteste personne. Pas encore.
Parce qu'il est tout neuf, lui. Personne ne l'a encore abîmé. Il est l'humanité toute entière, dans son état le plus sublime, celui qui sourit aux inconnus et prêterait son Coco adoré à la petite fille qui pleure au parc juste pour la consoler.
Il me redonne foi parce que peut-être bien qu'au fond, nous aussi, on est restés un peu comme lui. Si on oublie les impôts, la voiture en panne, les vacances qu'on a pas prises, ce qu'on dîne ce soir et ce qu'on doit absolument faire demain.
Au fond, vraiment, quand on creuse, loin, loin, loin. Il y a toujours du bon, non ?
Il y a les gens tristes, les gens drôles, les gens heureux, les gens jaloux, les aigris, les colériques, les doux, les timides, les complexés, les ambitieux, les paresseux, les vrais gentils, les faux méchants, les durs, les frustrés, les romantiques, les pudiques. Parfois, tout ça chez la même personne, juste pas en même temps.
Je crois que l'amour manque aux cœurs flétris.
Je crois que l'amour manque aux cœurs flétris.
Que personne ne demande rien d'autre qu'aimer et être aimé.
Je n'y ai pas toujours cru, c'est vrai. Ça semble bien cheesy pour l'ancienne cynique que j'étais.
Mais prenez le bus avec un enfant, et vous verrez. C'est eux, qui ont la clé.
© Ourson Chéri |
Commentaires
Des bisous a vous trois.
Je vous lis dès que le temps me le permet et à chaque fois , j'ai cette impression que vous racontez mon histoire ... C'est étrange, je me sentais tellement seule à la naissance de mon premier , alors que j'étais soutenue par mon mari . Et comme vous le décrivez si bien, chéri peut pas comprendre tout le bouleversement qui se produit en nous au moment où on devient maman....aujourd'hui mon grand a 5 ans et a une petite sœur , et je comprends en vous lisant, en rencontrant d'autres mamans, et ça me soulage de savoir, que non je ne suis pas seule à avoir vécu ces moments de joie, de blues d'euphorie , de tristesse ... Un beau melting-pot de sentiment quoi .
Merci pour vos textes
Vero