Neva, un mois de toi


Le jour a déjà commencé à percer à travers les volets. Il est tôt... mais il ne fait plus nuit. C'est étrange. J'ai ce sentiment désagréable, comme quand on ouvre les yeux et qu'on sent qu'il est tard, trop tard, qu'on a raté son réveil et qu'on est à la bourre pour le travail. Mon coeur bondit. 

J'attrape le téléphone sur ma table de nuit. 
7h19. 
Je me retourne. 
Aaron est au milieu. "Bah qu'est ce que tu fais là, toi?". Il pouffe de rire silencieusement. 
"Chéri, tu t'es levé cette nuit?
-Non, et toi?
-Non". 

Je ne sais pas si ça durera, je n'y crois pas trop, et puis il y aura les dents, les chagrins, les cauchemars, les câlins, les verres d'eau parce que vraiment on a trop soif, le jouet qu'on a oublié dans le salon et qu'il faut ranger maintenant à tout prix, une dernière histoire, un dernier bisou, bref, il suffit de regarder Aaron pour savoir que les nuits ne sont jamais complètement acquises, mais tu nous l'a quand même faite et je n'oublierai jamais notre stupéfaction, une nuit de 10 heures à 1 mois (moins un jour), nos cernes un tout petit peu moins violettes ce matin-là, notre sourire de fierté, le bout du tunnel des nuits hachées qui semble s'esquisser, déjà, alors qu'on ne l'espérait même pas encore vraiment. C'était hier et aujourd'hui, on fête un mois de surprise et d'émerveillement. 

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Entre nous c'est spécial. Cherche pas. Je connais par cœur chaque recoin de ton visage, je sens ton odeur unique rien qu'en fermant les yeux, je t'aime comme j'ai appris à aimer grâce à ton papa, et comme j'ai su qu'une maman pouvait aimer quand ton frère est né, juste avant toi. 
Tout est facile. Enfin... Rentrer à la maison n'a pas été facile, ton frère n'a pas été facile, retrouver les biberons, les dosettes de lait en poudre qu'on compte laborieusement, les nuits blanches, le manque de sommeil, aussi dur que dans mes souvenirs, l'envie irrépressible de prendre une douche de 20 minutes seule. Un mois. Je mange froid à nouveau, ça me brûle tellement j'ai mal au dos, et quand tu pleures j'ai le cœur en mille morceaux. 
Je pensais que tu y échapperais mais tu as bien hérité des coliques et du reflux, parfois tu peines à avaler ton biberon et moi je te regarde, démunie et désolée, pardon, ma poupée, j'ai fait de mon mieux pendant 9 mois mais apparemment pour le système digestif, je vous ai un peu bâclés

Pourtant, tout est facile parce que je te connais. C'est fou comme j'ai l'impression de tout deviner depuis le 4 juillet, immédiatement, il y a eu cette complicité, ce truc, et c'est beau, ça me fout la chair de poule de voir comme je te comprends en un instant. J'avais peur tu sais, je rêvais d'une fille, très fort, mais les femmes chez moi c'est compliqué, alors j'avais peur, malgré moi, de tout rater et me foirer en beauté. 

Pour ton frère j'étais si gauche, si peu confiante, oh comme je m'en veux maintenant de ne pas toujours avoir su, mais c'est la vie, il ne m'en a pas voulu, il m'a appris. Merci mon fils de m'avoir tant appris. Grâce à lui, je n'ai pas eu peur de ma fille. 
Je l'ai apprivoisée en une seconde et demie, en fait depuis que tu es née j'ai eu tout de suite l'impression d'être ta meilleure amie. 
Non je n'ai pas peur de toi ma fille, ce sera comme je te l'ai promis si souvent dans mon ventre. Toi et moi pour la vie, ta maman, ton amie, ton alliée, ta protectrice, ton admiratrice. 
J'ai fondu à la minute où je t'ai vue, 4 juillet 2017, 13h43, tu n'es pas juste ma fille, tu es ma princesse, je tuerai pour toi. 
J'ai passé des heures à t'admirer. Tes yeux immenses, ton petit nez retroussé, celui dont j'avais toujours rêvé, ta bouche en cœur, décidément notre marque de fabrique familiale. 
Ça a été facile, beaucoup trop facile de t'aimer. 

Je baissais mon lit d'hôpital au maximum pour pouvoir glisser ton berceau à roulettes juste au-dessus de moi. Pas à côté, nan, c'est trop loin, et puis je te vois pas bien, non au-dessus, comme un petit nuage en plastique transparent qui flotte au-dessus de mon lit et de mon ventre aplati, hop, j'ouvre les yeux et je te vois. On dormait comme ça, avec la tortue qui fait des vagues au plafond et la musique de spa en bruit de fond. Le mari m'envoyait des photos de lui, qui dormait avec Aaron et sa peluche serpent. Je ferme les yeux, c'est bon je peux mourir de bonheur à cet instant. 
La vie est belle. Même si tu te réveillais une heure après et que je faisais des tours de maternité avec mes tongs et un café, la vie était belle. 
Un mois. 
J'entends ta voix à la seconde où tu laisses échapper un petit cri. Tu fais des bruits de canard en dormant, du coup je pense souvent au Vilain Petit Canard, le dessin animé qui me faisait tellement pleurer quand j'étais gosse, je me suis promis que jamais, jamais, je ne rejetterais mes enfants, alors quand tu fais ton bruit de canard dans la nuit, je t'aime encore plus, je me retiens de toutes mes forces ne pas te reprendre contre moi et te dire que je serais toujours là. Je te mange de bisous, le front, les joues, le cou, je te vois frétiller avec la bouche en cœur et quand tu fais ça j'ai encore plus de mal à m'arrêter. T'es ma poupée, ma petite chérie, ma nounouchette, ma beauté d'amoureuse. 
Un mois. 
4,130 kg (+1kg) et 55 cm (+6,5cm), tu fais maintenant les mensurations de ton frère à la naissance, une vraie langoustine, tu bois 120ml 6 fois par jour, et à chaque biberon, tu t'arrêtes, systématiquement, à 60ml. Tu fais une pause, et tu repars. Tu as le hoquet une fois sur deux et ça me rend dingue pour toi. Comme ton frère, tu aimes les tétines MAM exclusivement et tu cries "lââ!" quand tu pleures, ce qui a la particularité d'être à la fois super triste et trop mignon. Tu ouvrais grand les yeux très tôt, tu m'as souris pour la première fois intentionnellement à trois semaines, et tu adores quand on fait jouer une boîte à musique près de toi. J'ai très envie de croire que c'est parce que j'ai découvert Empire pendant ma grossesse et que tu as hérité d'une oreille musicale (et éventuellement du talent de Jamal). 

Il n'y a pas eu de baby blues. Comme pour Aaron, je n'avais qu'une hâte, vous rencontrer. Vous êtes arrivés et le monde a trouvé un nouveau sens, j'étais la plus heureuse de la Terre, les hormones ont marché à l'envers, ni tristesse ni mélancolie, à la place, de l'or, du bonheur en barre, le sourire greffé au lèvres, la vie est beaucoup trop belle, c'est fou, merci, merci, merci, je ne sais pas si j'ai mérité tout ça, mais je le promets, j'en prendrais soin, jusqu'à mon dernier souffle, jusqu'au dernier battement de mon cœur, ma vie pour eux, jusqu'à la lune c'est pas assez, il n'y a même plus d'étoiles ni de soleil, ils m'ont donné beaucoup mieux. 

Plus de malédiction, plus de filiation,  juste moi, une maman dont le cœur bat pour son mari et ses enfants, il n'y a plus rien à prouver, à personne, mon destin c'est de vous aimer, j'y crois plus que jamais, c'est pour ça que je suis là, c'est pour vous que je suis là, et c'est la meilleure raison que j'ai jamais trouvée.

Déjà un mois ma nounouchkaïa. Je suis raide dingue de toi. Parfois j'ai du mal à croire la chance que j'ai de t'avoir, ma petite chérie, mon amoureuse trop mignonne, trop tout. Si tu savais. 


Je vais t'aimer comme on devrait tous être aimés. 

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Joyeux premier moisniversaire ma poupée. 



© Ourson Chéri

Commentaires

Carole a dit…
Joyeux moinniversaire petite sirène 💕
Alicia a dit…
C'est tellement beau j'en ai les larmes aux yeux.. Ça me renvoie à ce que je vis, une maman qui ne veut plus de moi alors je bois tes écris a chaque fois un peu comme une thérapie. Merci Delphine ❤
Anonyme a dit…
Merci pour ce partage! C'est très beau, l'amour a l'état brut, l'amour inconditionnel.
Tes mots sont très beaux, merci de nous les offrir.
Je ne te connais pas mais je suis heureuse pour toi. Quel bonheur fort! Profite bien, la vie est belle😊